Crise du logement et crise sanitaire ont marqué au fer rouge le 1er juillet 2020. Pénurie, discrimination, loyers inabordables, évictions, recherche de logement écourtée en raison du confinement : de trop nombreux ménages locataires se sont retrouvés contraints de louer un logement trop cher, trop petit, ou encore inadapté à leurs besoins. Les mesures d’urgence mises en place tardivement pour les locataires n’ayant pas réussi à signer un nouveau bail, l’incertitude est demeurée jusqu’à la dernière minute et la situation reste dramatique pour ceux qui n’y sont toujours pas parvenus.
Le 2 juillet, autour de 370 ménages locataires étaient sans logis, nombre inégalé depuis 2003. Dans ce contexte, les différentes régions ont dû et continuent à faire face à de nombreux défis.
À Montréal : un horizon sombre pour les ménages locataires
Le 1er juillet, 246 ménages locataires étaient toujours sans logement dans la grande région de Montréal. Sur la Rive Sud (Longueuil, Châteauguay, le Roussillon), à Laval et dans le sud de Lanaudière, un plus grand nombre de locataires ont fait appel aux services mis en place. À Montréal même, il y avait 182 ménages locataires sans logis, le tiers ayant subi une reprise de logement ou une éviction.
Le 1er août, 5 fois plus de demandes d’aide que l’année précédente avaient été faites à pareille date. Avec un taux d’inoccupation de 1,6%, soit très en dessous du seuil d’équilibre de 3% reconnu par la Société canadienne d’hypothèques et de logements, trouver un logement décent s’avère être un parcourt du combattant. Ainsi, le 1er octobre, 107 ménages locataires montréalais étaient toujours sans logis, certains hébergés par la Ville, d’autres par leur réseau et la plupart à haut risque d’itinérance. Les campements temporaires qui apparaissent dans plusieurs quartiers en témoignent. Ils sont en effet le reflet du manque de logements à bas loyers. Les familles montréalaises sont aussi particulièrement mal prises, le taux d’inoccupation des grands logements étant de 0,8% dans la métropole. Face à l’inaction gouvernementale et l’ampleur des besoins, il est difficile d’entrevoir un dénouement de crise.
Gatineau : une crise qui perdure
La pénurie de logements s’est aggravée à Gatineau, notamment à cause de la destruction de nombreux immeubles causée par les inondations et les tornades des dernières années. Depuis 2 ans, le taux d’inoccupation de 1,5% est l’un des plus faibles au Québec et les loyers augmentent très vite. Avant le 1er juillet, des dizaines de familles et de personnes seules qui ont perdu leur logement n’ont toujours pas réussi à se reloger de façon permanente. Plusieurs n’ont pas accès aux mesures d’aide gouvernementales et sont accompagnés et hébergés par les organismes communautaires du milieu, à leurs frais. L’insuffisance des mesures d’aide pousse des locataires à la rue. Comme à Montréal, on assiste à une multiplication des campements temporaires en Outaouais.
Sherbrooke, Québec et Rimouski : des demandes d’aides qui explosent
Malgré un taux d’inoccupation un peu plus élevé, soit respectivement de 2,6 et 2,3%, les besoins s’accroissent également à Sherbrooke et à Québec. Quelque 42 ménages locataires sherbrookois étaient sans logis le 1er juillet, soit plus du double que l’année précédente. Les 24 ménages locataires ayant été hébergés temporairement aux frais de la Ville ont eu besoin de deux fois plus de temps pour se trouver un nouveau logement. Sans alternative, certains ont dû louer un logement en mauvais état ou trop cher et plusieurs, sans emploi, se sont vu discriminés par les propriétaires.
À la même date, 34 ménages n’avaient toujours pas trouvé de logement à Québec et 3 fois plus de demandes avaient été reçues par l’Office municipal de la Ville que l’année précédente.
La recherche de logement compliquée à Québec s’explique non seulement par la pénurie et la pandémie, mais aussi en raison du loyer moyen des logements, un des plus élevés au Québec.
D’autres villes, telle que celle de Rimouski, ont dû répondre tant bien que mal aux besoins de dizaines de ménages risquant de se retrouver à la rue. En effet, les municipalités dont le taux d’inoccupation est supérieur à 2% n’ont pas accès au programme d’aide d’urgence gouvernemental. Ce manque de ressources fragilise et précarise les ménages qui se retrouvent rapidement sans issue.
Des locataires sans soutien
Dans plusieurs autres régions, telles que l’Abitibi-Témiscamingue et les Laurentides, les services d’aide ont été très peu publicisés ou aucun service adéquat n’a été mis en place pour soutenir les locataires. Dans ce contexte, trop de locataires se sont ainsi retrouvés sans ressource cette année.
Il faut agir maintenant !
Il est clair que sans action rapide de la part de Québec et d’Ottawa, la situation va se détériorer, que ce soit à cause de la pandémie et de ses impacts économiques ou de la pénurie de logements locatifs. Les aides apportées aux sans-logis du 1er juillet ont été trop tardives ou restrictives pour permettre à tous les ménages locataires mal pris d’y accéder. Pour preuve, moins de 200 ménages locataires ont bénéficié, à ce jour, d’un des 1800 suppléments au loyer annoncés. À la même période en 2005, près de 800 ménages avaient pu en profiter.
Pour sortir de ce cycle infernal, des mesures ambitieuses, tel que le développement de logements sociaux, sont indispensables. Sans quoi, le nombre de ménages mal logés ou à la rue va grossir et le prix des loyers continuer d’augmenter. Les gouvernements doivent prendre leurs responsabilités, maintenant !