Montréal, le 4 juillet 2023 – Selon les données recensées par le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), au Québec, au moins 490 ménages, suivis par un service d’aide, n’ont toujours pas réussi à signer un nouveau bail au lendemain du 1er juillet 2023, dont 115 à Montréal, 43 à Drummondville, 42 à Sherbrooke, 40 à Granby, 30 à Rimouski, 25 à Trois-Rivières, 25 à Saint-Jérôme, 17 à Gatineau et 15 à Québec.
Selon Véronique Laflamme, la porte-parole du FRAPRU, « ces chiffres ne reflètent pas la situation dans son ensemble, ne prenant pas en compte tous ceux et toutes celles qui sont hébergés chez des proches, obligés de camper, de vivre dans leur voiture ou dans un motel ou encore de prolonger leur séjour en maison de transition, ni ceux et celles ne s’étant pas manifesté auprès d’un service d’aide ou qui étaient déjà en situation d’itinérance. Il y a aussi beaucoup trop de locataires qui ont dû consentir à louer un logement trop cher, trop petit ou insalubre », insiste Véronique Laflamme. Selon le FRAPRU, afin d’éviter que la situation n’empire et que les ménages locataires actuellement sans bail ne se retrouvent définitivement en situation d’itinérance, le gouvernement Legault doit non seulement prévoir des mesures d’aide d’urgence et d’hébergement temporaire plus généreuses, à l’année et dans toutes les régions, mais surtout, construire plus de logements sociaux, dans les plus brefs délais.
Alors que 680 ménages locataires n’ayant pas trouvé de logement étaient recensés les derniers jours précédant le 1er juillet, le FRAPRU relève que le nombre de ménages sans-logis rapporté au lendemain de la grosse journée des déménagements est sûrement attribuable au déploiement de beaucoup plus de Services d’aide à la recherche de logements (SARL), maintenant financés par le gouvernement du Québec, dans davantage de régions, ce qui représente une nette amélioration, selon lui. Le chiffre est conservateur signale le regroupement, puisqu’il manquait notamment des données pour certaines municipalités. « Cependant, il reste du travail à faire pour que l’aide soit connue et organisée plus tôt, et que l’ensemble des ménages qui devraient y avoir droit y aient effectivement accès », indique Véronique Laflamme. Le regroupement souligne également que la situation ne s’arrête pas au 1er juillet, pas plus qu’elle n’y a commencé. « Il y a des dizaines d’autres ménages qui sont déjà en recherche de logement pour le 1er août, voire le 1er septembre, et pour ceux qui sont actuellement sans-logis, ça peut prendre des semaines avant de se reloger », explique Véronique Laflamme.
Selon le FRAPRU, la pénurie de logements locatifs est en grande partie responsable de la situation, mais la folle ascension des loyers des logements mis en location les rend également inaccessibles à un nombre grandissant de locataires. Le FRAPRU rappelle que selon la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), la proportion de logements disponibles à la location au Québec est sous le seuil d’équilibre depuis plusieurs années. Entre octobre 2018 et 2022, elle a oscillé entre 2,4 % et 1,7 %, soit bien en dessous du seuil d’équilibre de 3 %, reconnu par la SCHL. Ce taux avoisine actuellement le 0 % dans plusieurs municipalités. Les dernières données de la Société démontrent également que le loyer moyen de l’ensemble des logements locatifs a augmenté de 25,1 % en 4 ans et que le loyer des logements inoccupés progresse encore plus rapidement. Par exemple, dans la région métropolitaine de recensement de Montréal, il a augmenté de 27 % au cours de la seule dernière année. Enfin, d’après la plus récente enquête du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ), le loyer moyen des logements offerts en location sur la plate-forme Kijiji durant l’hiver et le printemps 2023 au Québec, était de 1470 $ par mois.
D’autre part, selon les données de Statistiques Canada, le Québec comptait lors du dernier recensement, 128 795 ménages locataires qui engloutissaient plus de la moitié de leur revenu pour se loger à chaque mois, alors qu’en moyenne, ce dernier se situait autour de 18 600 $ par année. « Dans ce contexte, les 1500 nouveaux logements dits abordables annoncés dans le dernier budget de Québec, sont absolument insuffisants », constate la porte-parole du FRAPRU. Elle insiste : « si on veut renverser la tendance et répondre aux besoins les plus urgents, il faut un minimum de 50 000 logements sociaux et communautaires hors marché, en 5 ans, autant en construction neuve que par l’acquisition et la rénovation de bâtiments résidentiels déjà construits. Et si le gouvernement fédéral décidait enfin de réaffecter les sommes consacrées aux différentes initiatives de sa Stratégie nationale sur le logement (qui ne donne visiblement pas les résultats escomptés), au secteur sans but lucratif, il pourrait contribuer à ce nécessaire chantier », souligne au passage le regroupement.
Mais pour le FRAPRU : « c’est d’abord Québec qui doit fournir des outils adéquats pour mener à bien un tel chantier, en se dotant d’un programme entièrement dédié au logement social, qui fonctionne et se suffise à lui-même. Le gouvernement ne peut pas se dédouaner de ses responsabilités. Ça ne peut plus attendre », insiste Véronique Laflamme, rappelant au passage que le milieu communautaire en habitation a déjà patienté depuis 4 ans, pour des améliorations qui n’ont jamais été apportées au programme AccèsLogis. « Malgré les quelques modifications récentes apportées au nouveau Programme d’habitation abordable – Québec (PHAQ), celui-ci ne répond toujours pas aux contraintes et aux obligations des projets d’habitation sociale », constate la porte-parole de l’organisme pour le droit au logement.
Alors que la ministre responsable de l’habitation, France-Élaine Duranceau, devrait déposer à l’automne un plan d’action en Habitation (annoncé initialement pour mars 2022), le FRAPRU s’attend à ce qu’il inclut des objectifs ambitieux de développement de logements sociaux, par des coopératives, des OSBL et des offices d’habitation, sur plusieurs années.
Enfin, pour freiner l’explosion du coût des loyers ou les évictions frauduleuses qui affectent un nombre toujours plus important de locataires, le FRAPRU presse Québec de mieux les protéger contre les abus du marché. Pour ce faire, il doit notamment retraiter sur son projet de les priver de leur droit de cession de bail et abolir complètement la clause F, dans le projet de loi 31 qui sera débattu à la rentrée.
Toutefois, le FRAPRU craint que le gouvernement québécois ne rate encore la cible, s’il n’adopte pas une politique en habitation, basée sur la reconnaissance formelle du droit à un logement décent, comme le demandent plus de 500 organisations sociales, avec lui.
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Véronique Laflamme : 418 956-3403 (cell.); 514 522-1010 (bureau)