Une stratégie gouvernementale en habitation insuffisante selon le FRAPRU

Montréal et Québec, le 22 août 2024 – Le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) qualifie de décevante et d’insuffisante la Stratégie québécoise en habitation présentée aujourd’hui par la ministre responsable de l’habitation France-Élaine Duranceau. Le regroupement de défense du droit au logement est étonné qu’une stratégie sur laquelle le gouvernement travaille depuis 4 ans ne soit pas plus consistante et se dit d’autant plus inquiet pour la suite. « La montagne accouche d’une souris », déplore Véronique Laflamme, la porte-parole du FRAPRU, en constatant le peu de nouvelles mesures structurantes. « La plus grande lacune de la stratégie est l’absence de cibles précises pour augmenter l’offre de logements sociaux et communautaires, afin de diminuer le nombre de ménages ayant des besoins impérieux de logement », résume Véronique Laflamme.

Selon le FRAPRU la stratégie s’est concentrée principalement sur l’offre de logements, sans égard à leurs prix. « Pourtant, au-delà de la rareté, c’est bien à une crise d’inabordabilité à laquelle les locataires doivent faire face. La stratégie met l’accent sur l’augmentation de l’offre en établissant une cible de 560 000 nouveaux logements à mettre en chantier d’ici 10 ans, mais ne contient aucune cible de nouveaux logements sociaux sur la même période. Il s’agit d’une carence majeure, alors que de plus en plus d’organisations et d’élu·es conviennent de la nécessité de doubler le parc de logements sociaux et communautaires pour sortir durablement de la crise du logement au Québec », dénonce-t-elle. Selon le FRAPRU, afin de mettre à l’abri de la crise les ménages locataires dont les besoins sont les plus urgents, la part occupée par le logement sans but lucratif doit atteindre 20 % du parc locatif, or, elle n’en représente actuellement que 10,5 %. Afin d’atteindre cet objectif, le gouvernement du Québec doit prévoir la construction de 10 000 à 12 000 logements sociaux publics, coopératives d’habitation et logements sans but lucratif par année, durant cinq ans.

« Le gouvernement annonce qu’il va réfléchir à de nouveaux outils financiers pour le logement social et communautaire. Dans tous les cas, ça va prendre aussi des programmes gouvernementaux dédiés au logement social qui fonctionnent et qui se suffisent à eux-mêmes, ce qui fait toujours défaut », insiste Véronique Laflamme en rappelant que le retard accumulé dans la livraison de logements sociaux depuis plusieurs années repose principalement sur l’inadéquation et le sous-financement des programmes en place. « Ça fait des mois que des organisations de divers horizons et des municipalités demandent plus de prévisibilité pour favoriser le développement du logement social. Or, la stratégie gouvernementale n’en offre aucune », souligne madame Laflamme. Le FRAPRU constate que la seule cible en termes de logement social et abordable est celle de 23 000 logements qui seront réalisés sur 6 ans. En plus des unités prévues dans la mise à jour économique et dans les derniers budgets, ce chiffre inclut des logements déjà promis depuis plusieurs années, dont la moitié des 15 000 que la CAQ avait promis de réaliser dans son premier mandat et qui n’ont toujours pas été construits. Le FRAPRU espérait minimalement que la Stratégie prévoit de nouvelles annonces. Or, malgré la situation du logement qui se détériore et celle des locataires qui s’appauvrissent partout au Québec, la CAQ a le même objectif de développement que celui avancé lors de la dernière campagne électorale. 

Même le projet-pilote de logements modulaires qui sera lancé incessamment est dans les cartons depuis plusieurs mois. « On a l’impression que la machine gouvernementale continue d’avancer à pas de tortue, alors que partout au Québec les communautés sont aux prises avec les conséquences dévastatrices de la crise du logement et que des centaines de locataires se retrouvent sans alternatives en raison de l’insuffisance de logements sociaux. C’est incompréhensible », commente la porte-parole du FRAPRU.

La seule nouvelle mesure est l’utilisation des terrains et bâtiments publics excédentaires à des fins de logement « social, abordable et étudiant ». « S’agissant d’une mesure que l’on demande depuis des années, c’est une bonne nouvelle. Cela dit, le gouvernement doit agir rapidement et ces terrains et bâtiments publics qui nous appartiennent collectivement doivent être réservés en priorité à des projets sans but lucratif, les seuls à demeurer abordables durablement », rappelle Véronique Laflamme.

Enfin, en plus de ne pas fixer de cibles claires de logements réellement abordables à construire, la Stratégie ne prévoit rien pour contrer l’explosion du coût des loyers, présentant les actions posées jusqu’ici comme si elles étaient suffisantes, alors que l’insécurité résidentielle se répand. Même si le regroupement se réjouit que le gouvernement planifie enfin une campagne d’information sur les droits des locataires, il déplore que ni un registre, ni un contrôle obligatoire des loyers, y compris dans les immeubles récemment construits, ne soient sur le radar gouvernemental.

Alors que la ministre responsable de l’habitation affirme que la Stratégie sera évolutive, le FRAPRU ne désespère pas de convaincre le gouvernement Legault de faire plus et mieux d’ici la mise à jour économique de l’automne. C’est d’ailleurs pour rappeler l’urgence des besoins et demander à Québec de prendre les moyens de doubler le nombre de logements sociaux et communautaires d’ici 15 ans qu’il tiendra un camp à Québec rassemblant près de 200 personnes à l’occasion de la rentrée parlementaire les 14 et 15 septembre. La population est invitée à participer notamment à la grande manifestation de clôture de ce camp.

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Informations et demandes d’entrevues :
Véronique Laflamme, 418 956-3403 (cell.)