Par Émilie E. Joly, organisatrice communautaire et responsable des dossiers fédéraux au FRAPRU
Le 22 mars dernier, le ministre des finances, Bill Morneau, a déposé son deuxième budget, lequel compte très peu d’investissements dédiés spécifiquement au logement social. Le gouvernement Trudeau y lance pourtant ses premiers engagements concrets dans le cadre de sa toute nouvelle Stratégie sur le logement. Le FRAPRU est déçu du manque d’ambition de celle-ci. Les Libéraux n’ont pas encore confirmé que le droit au logement était au coeur de leurs préoccupations.
Les investissements annoncés en habitation sont majoritairement faits sous le chapeau généraliste de l’aide au « logement abordable ». Il reviendra aux provinces et aux territoires de choisir plus précisément à quelles fins ils les alloueront : logement social, logement abordable privé, suppléments au loyer privés, allocation logement, soutien pour l’accès à la propriété, aide à la rénovation ou à l’adaptation de domiciles… ? Le premier budget libéral de 2016-2017 était plus prometteur. Il avait doublé les sommes accordées jusque là par les Conservateurs pour le financement de l’Investissement dans le logement abordable ; elles atteignaient 515 millions $ en 2016-2017 et 495,8 millions $ en 2017-2018. Dans le dernier budget, l’enveloppe pour les nouvelles ententes du « Partenariat fédéral-provincial- territorial renouvelé en matière de logement » a été ramenée à 3,2 milliards $ sur 11 ans.
Ottawa ajoute également 5 milliards $ en 11 ans pour le nouveau « Fonds national pour le logement ». Toutefois, il ne précise la proportion qu’il réserve pour développer de nouveaux logements sociaux véritablement accessibles aux ménages à faible revenu. N’apparaît pas non plus la proportion qui servira à maintenir des bas loyers dans les logements sociaux déjà construits.
Le FRAPRU aurait préféré qu’au moins 2 milliards $ soient investis à chaque année pour soutenir la réalisation de nouveaux logements sociaux, afin d’aider 1,5 million de ménages canadiens qui ont actuellement des besoins impérieux de logement, dont 348 485 vivent au Québec, de même que l’engagement formel de reconduire les subventions au loyer des locataires à faible revenu qui habitent dans les logements sociaux réalisés avant 1994 et qui vont arriver incessamment à échéance.
Le fédéral cible davantage la classe moyenne ; répondre aux besoins des ménages les plus mal-logés n’est apparemment pas sa priorité. Alors qu’Ottawa annoncera bientôt une autre stratégie, pour réduire la pauvreté cette fois, le FRAPRU s’attendait à des investissements mieux ciblés en matière d’habitation.