Les attaques sans précédent contre les programmes sociaux et les services publics sont en train d’engendrer une mobilisation contre les politiques néolibérales qui pourrait être historique. À l’heure où le Québec multiplie les manifestations contre l’austérité, de plus en plus de voix s’élèvent pour dire qu’avant de couper, il faut aller chercher l’argent là où il se trouve.
Dès la rentrée, la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics a lancé la lutte autour d’une grande demande : 10 milliards $ de solutions fiscales mettant davantage à contribution les plus fortunés et les grandes entreprises, 10 milliards $ qui permettraient, non seulement d’éviter les coupes, mais aussi de mieux financer les services publics et les programmes sociaux. Des centaines de documents ont été distribués, des formations et des présentations publiques ont été faites dans différents milieux. Le discours en faveur d’une nécessaire redistribution de la richesse a enfin commencé à se propager.
Des exemples de solutions
Pour augmenter les revenus, la Coalition propose notamment d’augmenter la contribution des entreprises, dont l’effort fiscal ne cesse de diminuer. Cela passe par l’augmentation de leur taux d’imposition, par une révision des privilèges fiscaux dont elles bénéficient et par un grand ménage dans les subventions que l’État leur accorde et qui nous privent collectivement de millions de dollars à chaque année.
La Coalition propose aussi de revenir à une plus grande progressivité de l’impôt sur le revenu des particuliers. Alors qu’en 1988, le Québec avait 16 différents paliers d’imposition selon les revenus, il n’en reste aujourd’hui que 4. Au fil des ans, le premier palier d’impôt a augmenté, tandis que le dernier a diminué. Une réelle équité fiscale passe donc par l’augmentation du nombre de paliers d’imposition. Celle-ci permettrait d’aller chercher jusqu’à 1 milliard $ de plus par année, sans que les gens à revenu modeste et la classe moyenne ne soient pénalisés.
Une autre proposition, chère au FRAPRU, est de rétablir la taxe sur le capital, abolie totalement en 2011, dans le cas des banques et des entreprises financières qui alignent année après année des profits record. À elle seule, cette mesure permettrait d’aller chercher les 600 millions $ manquants à chaque année pour financer 50 000 logements sociaux en cinq ans.
Et ce ne sont là que quelques exemples des 18 solutions proposées pour arriver à l’objectif de 10 milliards $.
De fortes mobilisations
En plus de mobilisations tenues dans presque toutes les villes, à l’initiative de groupes locaux, pour accueillir les forums citoyens sur la fiscalité, la Coalition a organisé un rassemblement à l’occasion de la première journée de consultations publiques de la Commission présidée par l’économiste et fiscaliste, Luc Godbout. À Québec, la Coalition pour la justice sociale a fait de même, à chacun des trois jours de consultations.
Quelques jours plus tard, la manifestation nationale du 31 octobre contre les politiques d’austérité et pour la redistribution de la richesse a réuni des dizaines de milliers de personnes à Montréal et des centaines d’autres à Sherbrooke, Rimouski, Jonquière, Baie-Comeau, Gatineau, La Tuque et les Îles-de-la-Madeleine. À cette occasion, 80 000 étudiantes et étudiants avaient voté la grève.
Le collectif Refusons l’austérité, formé par les centrales syndicales et appuyé par plusieurs groupes dont le FRAPRU, a pour sa part continué de marteler le message jusqu’au 29 novembre, avec une campagne dans les médias sociaux, vidéos et vignettes web à l’appui, pour dénoncer l’austérité et soulever diverses propositions fiscales.
Au moment d’écrire ces lignes, les groupes sociaux sont portés par le succès des manifestations simultanées du 29 novembre à Montréal et à Québec, qui, avec une participation totale de 125 000 personnes, ont été sans précédent depuis le printemps 2012.
Il semble cependant que cela n’ait pas suffi à ébranler le gouvernement Couillard et ses ministres économiques. La lutte devra se poursuivre et s’intensifier. Le prochain moment de mobilisation connu est la semaine d’actions appelée par la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics, du 23 au 27 février 2015. Les groupes sont invités à organiser diverses actions dérangeantes. L’appel a également été lancé à tous les réseaux mobilisés contre l’austérité. Le FRAPRU en sera. Non seulement l’hiver, mais le printemps 2015, risquent d’être occupés. Les groupes sociaux sont notamment appelés à se positionner sur une grève sociale, le 1er mai. Les membres du FRAPRU ont voté de se joindre à ce mouvement. À suivre !
Photo : André Querry