Par Jean-François Carrier, intervenant au soutien communautaire à la Fédération des OSBL d’habitation de Montréal (FOHM)
Même si le revenu social universel garanti (RSUG) semble être un nouveau concept, il est intéressant d’apprendre qu’il fût présent dès 1601 dans la loi anglaise sur les pauvres (Poor Law) et qu’il servait à faire le lien entre l’assistance sociale et les principes de dignité et de citoyenneté. Malheureusement, il entre souvent en conflit avec l’aide sociale, la redistribution de la richesse et l’incitation au travail.
Il existe une multitude d’appellations pour parler du RSUG : revenu de citoyenneté, allocation universelle, revenu minimum garanti (RMG), revenus d’existence, revenu de base ou encore revenu social. En fait, l’idée de base est simple : offrir une allocation universelle récurrente à tous les citoyens et à toutes les citoyennes, peu importe leur situation financière. Trois modèles sont davantage discutés.
Le revenu minimum garanti (RMG)
Le revenu minimum garanti (RMG) est présentement à l’étude par le gouvernement libéral du Québec, plus précisément par les ministres François Blais et Carlos Leitão, soutenus par un comité d’experts de la finance, dont le rapport sera publié le 17 juin prochain. Connaissant l’arrogance et le mépris du présent gouvernement, la proposition de RMG qui en découlerait soulève plusieurs craintes et interrogations. Il est très possible de croire que, avec son approche néolibérale, il propose une allocation beaucoup plus basse qu’un véritable montant nécessaire de subsistance. Cette nouvelle réforme pourrait aussi servir à éliminer certains programmes existants, au nom de l’implantation d’un revenu minimum garanti. Plusieurs pourraient donc se retrouver dans une situation encore plus précaire qu’avant l’arrivée du fameux RMG.
Le revenu de base
Le concept de revenu de base, proposé par le mouvement international Basic Income Earth Network se situe entre le revenu minimum garanti (RMG) et le revenu social universel garanti (RSUG). Il se définit par quatre grands axes : il est universel, individuel, inconditionnel et se détermine par un niveau de revenu de base calculé à 60 % du revenu médian enregistré dans le pays. Au Québec, il se situerait environ à 1400 $ par mois. Dans ce scénario, les services publics déjà existants demeurent en place.
Le revenu social universel garanti
Le revenu social universel garanti (RSUG) est un concept qui a été développé par le Front commun des personnes assistées sociales du Québec (FCPASQ) et le Groupe de recherche et de formation sur la pauvreté au Québec (GRFPQ). De toutes les formes de revenu, c’est celui qui serait le plus généreux et qui offrirait une réelle possibilité aux gens de vivre dans la dignité. Plusieurs principes soutiennent ce programme, notamment l’importance pour la société d’assurer à tous et toutes les ressources nécessaires.
L’universalité est une prémisse du RSUG et viserait à garantir un même revenu de base pour tous et toutes, éliminant ainsi de nombreux préjugés en lien avec l’aide sociale.
Un autre principe est celui de l’autonomie économique puisqu’il vise à sortir des personnes de la dépendance économique. Également, il préconise une diminution importante du contrôle et de la répression ; n’ayant plus besoin d’inspecteurs à l’aide sociale. Les gens auraient enfin le droit de s’entraider et vivre ensemble légalement, sans avoir peur de se « faire couper » leur chèque.
Cette orientation se démarque par une offre majorée de services publics gratuits, universels et garantis. Le montant proposé par le FCPASQ est de 1 667 $ par mois, par personne, et serait donné de la naissance jusqu’à la mort.
Peu importe le modèle retenu par le Comité ministériel, plusieurs questions demeurent en suspens. Le Québec n’étant qu’une province, le gouvernement fédéral couperait-il le financement de certains programmes ou les transferts d’argent si les conditions d’obtention ne sont plus respectées ?
Un revenu universel pourrait permettre un seuil minimal, tant et aussi longtemps qu’il est bien appliqué et avec certaines garanties. Toutefois, présentement, dans le système politique néolibéral où nous nous trouvons, plusieurs d’entre nous risqueraient d’y perdre au change et ce ne sera évidemment pas les plus riches qui seraient pénalisés.