Montréal, le 16 avril 2024 – Le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) accueille favorablement certaines des mesures proposées dans le Plan du Canada sur le logement dévoilé vendredi et dont les détails seront annoncés dans le budget de la ministre Chrystia Freeland. Il estime cependant que le gouvernement Trudeau mise encore trop sur le marché privé pour s’attaquer à la crise du logement.
Sa porte-parole, Véronique Laflamme, explique cette réaction en demi-teinte « Depuis des années, le FRAPRU revendique un vigoureux changement de cap d’Ottawa dans ses investissements en logement pour qu’ils soient clairement dirigés vers le secteur sans but lucratif et l’aide aux personnes et aux familles qui vivent le plus durement les effets de la crise. La Défenseure fédérale du logement et le Conseil national du logement, deux entités mises sur pied par le gouvernement fédéral pour surveiller le droit à un logement adéquat au Canada, ont fait des recommandations allant dans le même sens. Certaines des mesures du Plan du Canada sur le logement qui seront confirmées aujourd’hui opèrent un tel virage, mais les incitatifs visant à encourager les promoteurs privés à construire, eux, ne peuvent résulter qu’en des logements totalement inabordables dans le contexte actuel ».
Des changements salués
Le FRAPRU salue l’ajout attendu dans le budget de 1 milliard $ pour le Fonds pour le logement abordable permettant « de soutenir davantage les fournisseurs de logements sans but lucratif, coopératifs et publics et de répondre aux besoins des personnes les plus touchées par la crise du logement ». Il considère cet investissement additionnel d’autant plus bienvenu qu’il permettra entre autres de pérenniser l’Initiative de création rapide de logements qui finance la réalisation de logements abordables permanents pour des personnes et des familles vulnérables.
Le regroupement se réjouit aussi de la création d’un Fonds canadien de protection des loyers de 1,5 milliard $ qui permettra l’acquisition de logements locatifs existants pour les sortir de la spéculation. « Le FRAPRU revendiquait une mesure similaire depuis des années », rappelle Véronique Laflamme, en ajoutant que les fonds prévus ne seront pas suffisants, puisque ce sont des contributions plutôt que des prêts qui devraient être accordées pour assurer la pérennité et l’accessibilité financière des logements sans but lucratif ainsi réalisés.
Le FRAPRU attend enfin avec impatience les détails du Programme de coopératives d’habitation doté d’un budget de 1,5 milliard $ et annoncé lors du budget 2022. Véronique Laflamme lance un appel à ce sujet : « Le modèle de coop d’habitation qui s’est historiquement développé au Québec est basé sur une mixité de revenus permettant entre autres à des ménages à faible revenu d’y avoir accès, grâce à une aide financière additionnelle. C’est aussi ce que devrait faire le nouveau programme dont les détails seront dévoilés à l’été 2024 ».
Trop pour les promoteurs privés
« C’est bien beau de vouloir construire plus de logements, plus rapidement, comme l’affirme le Plan du Canada sur le logement, mais il ne faudrait pas pour autant construire à n’importe quel loyer et augmenter ainsi le problème d’inabordabilité ». C’est en ces termes que Véronique Laflamme a fait part du désaccord du FRAPRU face à certaines mesures du Plan favorisant en grande partie les promoteurs privés et des logements qui sont majoritairement inabordables, dont l’ajout de 15 milliards $ dans le Programme de prêts à faible coût et l’introduction d’une nouvelle mesure de déduction fiscale permettant aux constructeurs de « lancer davantage de projets en augmentant leur retour sur investissement après impôt » qui s’ajoute à l’élimination de la taxe sur les produits et services (TPS) sur les nouveaux projets d’appartements locatifs, peu importe leur loyer. « C’est dilapider indirectement des sommes qui seraient beaucoup plus utiles en logement social », insiste Véronique Laflamme.
Le FRAPRU s’inquiète finalement de l’utilisation que le gouvernement fédéral pourrait faire de ce qu’il appelle « un plan historique de terres publiques disponibles pour le logement ». Il craint que ce plan répète les erreurs de l’Initiative des terrains fédéraux, inaugurée en février 2019 et qui, en décembre 2023 avait permis la réalisation de 4000 logements mais dont 57 % n’étaient même pas abordables, selon les critères fédéraux déjà élastiques. Il ajoute qu’au Québec, cette initiative n’a jusqu’ici servi qu’à la réalisation de 12 logements. Le FRAPRU réclame que les terrains publics soient réservés au secteur sans but lucratif.
« Le gouvernement Trudeau semble avoir compris qu’il devait favoriser davantage le logement sans but lucratif qu’il ne le faisait jusqu’à maintenant avec sa Stratégie nationale du logement. Il doit cependant aller beaucoup plus loin et y concentrer ses investissements. Le logement social demeure le seul véritable moyen de s’attaquer en profondeur à la crise du logement dans toutes ses dimensions, dont la pénurie d’appartements, mais aussi leur inaccessibilité financière et il faut prendre tous les moyens pour augmenter rapidement la maigre part qu’ils occupent sur le parc locatif du Québec et du Canada », conclut la porte-parole du FRAPRU.
Le FRAPRU analysera le budget qui sera déposé aujourd’hui et y réagira. Il se réjouit de possibles mesures fiscales visant à faire contribuer davantage les très riches aux fonds publics en espérant que ces fonds permettront de lutter davantage contre les inégalités en finançant massivement le logement social. Le regroupement espère que d’autres mesures fiscales favorisant de façon disproportionnée les propriétaires, comme l’exemption de gains en capital, seront également revues.
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Pour plus d’informations
Véronique Laflamme : 418 956-3403 (cell.), 514 522-1010 (bureau)