Ottawa, le 27 novembre 2013 – « La situation des mal-logés et des sans-abri est beaucoup trop grave pour laisser Stephen Harper abandonner le logement social, en mettant fin aux subventions à long terme qu’il accorde encore à près de 600 000 logements sociaux existants au Canada dont 127 000 au Québec et 227 000 en Ontario ». C’est en ces termes que François Saillant, coordonnateur du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), a interpelé le premier ministre lors d’une manifestation qui s’est terminée devant ses bureaux de l’Édifice Langevin, à Ottawa. Des tentes rouges illustrant l’urgence des problèmes de logement et d’itinérance y ont été déployées. L’évènement, qui réunissait plusieurs centaines de personnes provenant d’un peu partout au Québec, a débuté devant une coopérative d’habitation de Gatineau, qui sera prochainement privée de subventions fédérales.
Le FRAPRU réclame que le gouvernement conservateur annonce sans plus tarder la poursuite des subventions qu’il verse depuis des décennies aux HLM, ainsi qu’à la majorité des coopératives d’habitation et des logements gérés par des Organismes sans but lucratif (OSBL) du Canada. Il demande à Ottawa de changer radicalement de cap, en majorant plutôt ses budgets en habitation pour pouvoir venir en aide à un plus grand nombre de familles et de personnes. Ces revendications sont partagées par plusieurs autres groupes du reste du Canada, membres d’une toute nouvelle Coalition canadienne pour le droit au logement. D’autres actions ont eu lieu à ce sujet depuis le 22 novembre à Toronto, Winnipeg et Vancouver.
Le FRAPRU a précisé que des données publiées récemment par Statistique Canada à partir de l’Enquête nationale auprès des ménages, menée en 2011, montre une sérieuse détérioration de la situation du logement. Ainsi, le nombre de ménages locataires canadiens consacrant plus de la moitié de leur revenu pour se loger se chiffre maintenant à 774 000, une augmentation de 11 % par rapport à 2006. Parmi ces ménages, 228 000 résident au Québec et 274 000 en Ontario. La situation est tout aussi désastreuse dans la région de la capitale canadienne, 21 970 ménages locataires engloutissant plus de la moitié de leur revenu en loyer à Ottawa et 7700 à Gatineau. Il s’agit, dans ce dernier cas, d’un accroissement de 29 % par rapport à la situation de 2006.
Une évaluation très conservatrice, publiée plus tôt cette année, évaluait par ailleurs à 200 000 le nombre de personnes se retrouvant en situation d’itinérance à un moment ou à un autre au cours d’une année.
L’abandon du logement social
En se basant sur les chiffres mêmes de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), le FRAPRU affirme que le nombre de logements subventionnés par le gouvernement fédéral a déjà diminué de 34 000 depuis l’arrivée au pouvoir de Stephen Harper en 2006 et qu’il baissera à nouveau de 104 000 d’ici 2017. Quelque 39 000 logements seront touchés dès 2014 et 2015.
L’organisme considère qu’il y a urgence d’agir avant que la situation devienne irréversible. Il rappelle que les subventions fédérales servent pour l’essentiel à venir en aide aux locataires à très faible revenu des logements sociaux. Leur perte se soldera par des hausses de loyer majeures. Les logements, qui ont été subventionnés pendant des décennies, deviendront du même coup beaucoup moins accessibles financièrement pour les ménages qui en auront besoin à l’avenir. Dans le pire des scénarios, la perte des subventions pourra aussi ouvrir la porte à la privatisation d’une partie des logements.
Selon le FRAPRU, ce désengagement d’Ottawa envers les logements sociaux existants serait d’autant plus scandaleux que le gouvernement conservateur ne consacre présentement que des miettes à la construction et à la rénovation de nouveaux logements. Le budget présenté le 21 mars dernier par le ministre des Finances, Jim Flaherty, a confirmé que, d’ici le 31 mars 2018, à peine 253 millions $ seront octroyés par an à cette fin à l’ensemble des provinces et des territoires du Canada. Pour un, le Québec ne recevra, au cours des cinq prochaines années, que 58 millions $ par année du fédéral pour tous ses programmes d’aide au logement, qu’il s’agisse de la construction de nouveaux logements sociaux, d’allocation-logement, de rénovation domiciliaire et d’adaptation de domicile. Le FRAPRU, qui qualifie ces sommes de « peanuts », réclame une augmentation très sérieuse des investissements fédéraux.