Le 22 mai prochain, le FRAPRU et ses groupes membres amorceront des occupations de bâtiments et de terrains pour revendiquer le financement par Québec et Ottawa, nécessaire à la mise en chantier de 10 000 logements sociaux par année, pendant 5 ans.
Au Québec, c’est près d’un ménage locataire sur 10 qui débourse 80 % et plus de son revenu pour payer son loyer, une situation qui entraîne d’extrêmes difficultés pour répondre à tous leurs autres besoins. Comment bien s’alimenter, se vêtir, se transporter, payer ses médicaments et peut-être même profiter de quelques petites sorties, lorsque, dès le 2e jour du mois, le compte est presque à sec ?
Au Québec, le logement social subventionné permet aux ménages à faible et modeste revenus de payer 25 % de leur revenu. Toutefois, le nombre de logements sociaux est bien insuffisant pour répondre aux besoins. Près de 40 000 ménages sont présentement admissibles et inscrits sur une liste d’attente auprès d’un Office municipal d’habitation, dont près de 25 000 ménages seulement à Montréal. Le Canada se situe ainsi au 16e rang, sur 24 pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) quant à la proportion de logements sociaux sur l’ensemble de tous les logements ; soit 4,1 %, comparé à 34,1 % aux Pays-Bas ou 18,7 % en France.
Le Canada et le Québec se sont déjà engagés, en adhérant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), à oeuvrer « au maximum [des] ressources disponibles » à la réalisation de différents droits, dont celui à un logement suffisant. Cet engagement ne s’est toutefois pas encore traduit par des mesures concrètes et des investissements suffisants.
Le manque dramatique de logements sociaux s’explique par l’inaction des gouvernements, tant au niveau fédéral que provincial. Si Ottawa avait continué à financer le même nombre de logements sociaux qu’à la fin des années 1980, au lieu de se retirer totalement de ce domaine à partir du 1er janvier 1994, le Québec compterait aujourd’hui 69 000 logements publics, coopératifs et sans but lucratif de plus. Québec, pour sa part, soutient le développement de logements sociaux à travers le programme Accès-Logis. Mais, au lieu de faire le choix d’y investir massivement pour répondre aux besoins les plus criants, le gouvernement Couillard a plutôt choisi, en 2015 et en 2016, de couper le nombre d’unités subventionnées de 3000 à 1500.
Les budgets présentés en mars dernier, à Québec et à Ottawa, restent tout aussi décevants. Le budget Leitão a bien annoncé des investissements dans le logement social à la hauteur de 3000 unités cette année, mais ces nouveaux investissements n’équivalent qu’au nombre de logements qui n’ont pas été financés depuis deux ans. Au niveau fédéral, 11,2 milliards $ ont été prévus sur 11 ans, mais peu de ces fonds sont destinés spécifiquement au logement social et aux besoins des ménages à faible revenu. L’incertitude est également maintenue quant à l’avenir des subventions fédérales pour maintenir l’accessibilité financière des logements sociaux réalisés avant 1994 et qui arrivent bientôt à échéance. Le budget annonce que des fonds devront être déterminés au cours de la prochaine année « en vue d’aider les fournisseurs de logements sociaux à faire la transition vers des modèles d’exploitation plus efficients et plus viables sur le plan financier ».
Pour qu’on puisse répondre aux besoins les plus urgents, le FRAPRU revendique 50 000 nouveaux logements sociaux coopératifs, sans but lucratif et publics, en cinq ans. Cette demande, loin d’être exagérée, permettrait de s’occuper sérieusement du respect au droit au logement.
Pour y parvenir, il demande au gouvernement Trudeau de doubler le budget de la Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL), pour soutenir spécifiquement le développement de nouveaux logements sociaux. Il est également essentiel de poursuivre les subventions à long terme versées aux logements sociaux existants, qu’ils soient sous les responsabilités fédérale, provinciale, territoriale ou municipale. Considérant les importants manques à gagner en matière d’habitation dans les communautés autochtones, des fonds particuliers devraient également être investis de manière récurrente dans la construction et la rénovation de logements dans les communautés des Premières Nations, dans les communautés inuites et nordiques, en impliquant les peuples concernés dans la conception et la réalisation de ces habitations.
Au Québec, le gouvernement Couillard doit choisir résolument d’investir dans le programme AccèsLogis, en augmentant le nombre de logements à réaliser à chaque année, mais également les subventions accordées à chacun d’eux, pour mieux refléter les coûts de réalisation dans chacune des régions. Malheureusement, le gouvernement provincial fait le choix de maintenir les montants de subventions dans AccèsLogis aux taux de 2009 plutôt que de les actualiser aux coûts de 2017, hypothéquant la réalisation de centaines de projets.
C’est pour toutes ces raisons que le FRAPRU et ses membres sont en action ! Plusieurs moyens pourraient être utilisés pour augmenter l’offre de nouveaux logements sociaux : poursuivre la construction de logements, notamment pour les familles, acheter des immeubles à logements existants puis les rénover, en vue de les transférer à des coops ou des OSBL d’habitation, ou recycler des bâtisses non-résidentielles. Il ne manque que la volonté politique !
Dès le 22 mai, par une série d’occupations dans différentes villes, nous mettrons en lumière divers endroits où du logement social pourrait être développé, au coeur de nos communautés.