Pourquoi une réserve de terrains ? Présentement, il y a un boom immobilier dans certains quartiers centraux de Montréal, où les terrains et les bâtiments s’y vendent comme des petits pains chauds ; certains pour construction immédiate et d’autres en attente, dans un but spéculatif. La demande y est tellement forte que lorsqu’un OSBL d’habitation ou un groupe de ressources techniques (GRT) veut un terrain pour construire du logement social, il n’a pas le temps d’amasser l’argent nécessaire que le prix du terrain a déjà augmenté.
On peut aussi constater un autre phénomène qui a pris de l’ampleur récemment : l’inclusion de logements sociaux dans les ensembles de condos construits sur d’anciens terrains publics qui appartiennent à la communauté et qui devraient demeurer à la disponibilité des quartiers, inclusion qui originalement se faisait sur des terrains privés. Dans certains quartiers de Montréal, il commence à être difficile de mettre la main sur un terrain sans avoir à mener une lutte et y dépenser des énergies considérables pour le voir littéralement donné sur un plateau d’argent à un promoteur privé.
Pour les bâtiments abandonnés, le changement de zonage se fait à la demande d’un promoteur immobilier, souvent discrètement et, s’il y a tollé, l’arrondissement invite parfois les gens du quartier à se faire entendre par consultation et référendum, mais la ville centre peut avoir le dernier mot. Les bâtiments sont souvent laissés à l’abandon parce qu’il est plus facile après plusieurs années de négligence d’avoir la visite d’un inspecteur pour le faire condamner et le démolir, ce qui est à l’avantage d’un futur acheteur parce que c’est le terrain qui a le plus de valeur.
Les travailleurs et les travailleuses au salaire minimum et les plus démuniEs sont laisséEs pour compte dans cette ruée pour la construction de condos, ruée qui détruit du même coup le tissu social d’un quartier et crée sa gentrification. Pour planifier un quartier à la mesure de tous ceux et toutes celles qui y demeurent, il est essentiel d’avoir une réserve de terrains dans chaque quartier pour pouvoir construire du logement social, pour les familles, pour lutter contre l’itinérance, pour les aînéEs ou pour les femmes victimes de violence, entre autres, selon le besoin et non ce que le marché immobilier dicte.
par Norman Laforce, militant au POPIR-Comité logement et président du FRAPRU